Elle n'a pas dit ça. En français, on dit que l'ancienne reine aQu'ils mangent de la brioche,”Ou“ Laissez-les manger de la brioche. ”Mais elle n'a pas dit ça non plus. C’était une phrase populaire à attribuer à l’aristocratie du 18ème siècle - une phrase à laquelle le philosophe suisse Jean-Jacques Rousseau parlait beaucoup. Mais la citation accrocheuse n'a jamais été prononcée par la reine.
Il est cependant révélateur de l’importance du pain pour les Français.
Aux 15ème et 16ème siècles, le Français moyen mangeait entre 1,5 et 2,5 livres de pain par jour. Les riches savouraient également de la viande et deux autres litres de vin chaque jour. Mais pour les pauvres, le pain constituait la majorité de leur alimentation. Alors, quand le blé se faisait rare, les Français risquaient de mourir de faim.
A Paris, ce risque était le plus aigu lors d'un siège.
Paris a subi de nombreux sièges au cours de sa longue histoire. Les Vikings ont assiégé la ville en 845. En 1429, c'était Charles VII et Jeanne d'Arc et, en 1870, les Prussiens. En ces temps d'austérité, les parisiens ont recours à tout, des chevaux militaires aux rats des rues et aux animaux de zoo. Et pendant un siège particulièrement problématique, ils mangèrent même du pain fabriqué à partir d'os humains.
La route menant à cet effroyable acte de cuisson a été pavée en 1589, après la mort du roi Henri III. Son cousin éloigné, Henri III de Navarre, était l'héritier du trône français. Malgré son baptême catholique, le roi de Navarre fut élevé comme protestant. À l'époque, la France était en proie aux Guerres de religion, une longue période de conflit entre protestants et catholiques qui dura 36 ans et coûta la vie à environ trois millions de personnes. Il n'est donc pas surprenant que la succession d'Henri soit loin d'être simple: il a fallu quatre années de guerre civile à la puissante Ligue catholique, un groupe anti-protestant allié à la Couronne espagnole, pour qu'Henri prenne le trône.
Après sa victoire contre la Ligue à la bataille d'Ivry, Henri se dirigea vers Paris. À la suite de ses armées, les paysans ont déserté leurs terres et se sont réfugiés dans la ville. Avec le temps, ils en sont peut-être venus à regretter la décision.
Henri prend le contrôle de plusieurs villes voisines, dont Nogent-sur-Seine et Provins, mettant en danger l'approvisionnement alimentaire parisien. Henri a également fait brûler tous les moulins à vent, empêchant les parisiens de produire du pain..
En mai, les parisiens étaient affamés. Les habitants mangeaient des chevaux et des mules, suivis des chiens et des chats. Ils ont ensuite grignoté l’herbe des parcs et finalement, au mois d’août, les Parisiens ont eu recours au "pain de Madame de Montpensier". Selon le 25 août 1590, sur l’entrée du chroniqueur parisien Pierre os de nos ancêtres »et nommés ainsi parce que Mme de Montpensier, membre influent de la ligue catholique,« exaltait son invention (sans jamais vouloir en goûter »).
Comment fait-on du pain de ses ancêtres? La plupart des témoignages expliquent que les pauvres désespérés ont d'abord découvert des ossements provenant des fosses communes du cimetière Holy Innocents. Ils ont ensuite broyé les os en farine et cuit cette farine en pain. Henrico Davilia, historien et témoin italien, l'a décrit comme «vile et macabre», un «aliment abominable si contagieux que, la substance étant venue des morts, elle a tellement augmenté de plusieurs fois».
Cette farine d'os n'était pas exactement un remplacement idéal pour le blé. Un manque de gluten, par exemple, empêche le pain de se tenir, et les os distillés ne sont pas des super-aliments. Comme Gabriel Venel l’a écrit dans son Précis de matière médicale, «L'idée de réduire en poudre les os humains […] ne pouvait venir que d'un esprit essentiellement ignorant et vaincu par la faim et le désespoir. Les os ne sont pas farineux et, lorsqu'ils restent longtemps dans un sol humide, ils ne contiennent aucun élément nutritif. ”
Mais même pendant la contrainte d'un siège, ces difficultés pratiques étaient moins inquiétantes que l'image de désintererrer le défunt pour nourrir les vivants. «Ce pain», écrit Madeleine Ferrières dans son livre Nourritures Canailles, “Est mauvais pour une raison simple: il a le goût du sacrilège et de l’anthropophagie. Pour beaucoup, c'est l'abomination de la désolation. "
On dit que la famine généralisée et les 40 000 à 50 000 décès qui en ont résulté ont été le facteur décisif qui a permis au roi Henri de constater l’erreur de son comportement. Il a permis à son armée de nourrir les parisiens. Peu de temps après, il lève complètement le siège et se convertit au catholicisme (et, ironiquement, embrasse la croyance de l'Église en la transsubstantiation).
«Paris, aurait-il dit à propos de sa conversion, vaut bien une messe»
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